Bénin: Décrispation du climat socio-politique - Patrice Talon peut et doit mieux faire

analyse

A son initiative, le président béninois, Patrice Talon, a eu un tête-à-tête avec son aîné et ennemi juré d'hier, l'ancien chef d'Etat, Boni Yayi. C'était le 13 juin dernier au Palais de la Marina. C'est la seconde fois que le président béninois rencontre son prédécesseur en l'espace de huit mois.

Avant Yayi Boni, l'ex-président Nicéphore Soglo et les anciens présidents de l'Assemblée nationale ont eu droit au même honneur. L'initiative présidentielle est bonne. Elle est d'autant plus louable qu'elle participe à instaurer un climat favorable à la réconciliation entre l'actuel locataire du Palais de la Marina et ses prédécesseurs.

Patrice Talon, faut-il le rappeler, s'était attiré les foudres de ses aînés qui ne s'étaient pas embarrassés de pester contre les grosses entailles sur la désormais méconnaissable vitrine de la démocratie au Bénin, face à ce que d'aucuns auront qualifié de dérives autocratiques de l'homme d'affaires devenu président.

Après avoir vu des vertes et des pas mûres dans le sulfureux climat de la dernière présidentielle, Yayi Boni a-t-il à présent fait table rase du passé ? En tout cas, si l'on s'en tient aux propos des deux personnalités au sortir de leur huis clos du 13 juin dernier, on peut, à tout le moins, croire que le climat d'animosité qui avait prévalu entre les deux hommes, s'est dissipé.

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Mais il est évident qu'il faut bien plus que des clichés affichant les sourires de ces deux anciens frères ennemis s'embrassant comme du bon pain, pour dire qu'il n'y a plus aucun nuage entre eux et leurs formations politiques respectives.

Et en fait de nuage, l'opposition politique béninoise en indexe un, gros et crucial, face auquel tout propos de dégel relèverait de la chimère. Il s'agit de l'épineuse question de la libération des opposants politiques ainsi que celle du retour des exilés politiques.

Les Béninois doivent se rassembler autour de l'essentiel

Le dirigeant béninois accédera-t-il à la requête de son opposition, qui en a fait un sujet de préoccupation majeure ? Talon se montrera-t-il bon prince ? Les opposants Reckya Madougou et Joël Aivo pourront-ils enfin humer le vent de la liberté ? On attend de voir.

Une chose est sûre : s'il veut réellement donner corps à la décrispation du climat socio-politique que bien des Béninois appellent de leur vœu, le numéro un béninois peut et doit mieux faire. D'ores et déjà, on peut se féliciter de son projet de formaliser un cadre d'échanges et de contacts entre les anciens chefs d'Etat et le président en exercice.

Reste à espérer que ce projet s'inscrira dans le champ du concret. En tout cas, rien ne devrait empêcher le dirigeant béninois à s'engager résolument dans la voie de la paix et de la concorde nationale d'autant qu'il se trouve à une étape de son magistère, qui devrait, en principe, le pousser constamment à bien préparer sa sortie ; lui qui a officiellement déclaré qu'il ne se porterait pas candidat à sa propre succession au terme de ses deux mandats, comme l'exige la Constitution.

C'est dire si l'ancien magnat du coton ne devrait pas mieux avoir à faire que de léguer à la postérité, un Bénin uni et réconcilié avec lui-même.

Il y a d'autant plus intérêt qu'une telle posture réhabiliterait son image ternie par ses réformes politiques controversées, dont certaines auront été perçues par bien des observateurs comme un grave recul de la démocratie.

En tout état de cause, les Béninois doivent se rassembler autour de l'essentiel. Et plus ils seront unis, et mieux ils trouveront les ressorts nécessaires pour faire face au grave péril de l'heure : le fléau terroriste qui n'épargne pas le Bénin.

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