Burkina Faso: Election président du CSC du 31 mai 2022 - " Il n'y a pas de doute quant à la légalité du P-V " (Tribunal administratif)

Après avoir dénoncé des vices de procédure dans la démission d'Abdoulazize Bamogo à la veille du scrutin du 31 mai 2022 qui l'a porté à la tête du Conseil supérieur de la communication (CSC), Marie Danielle Bougaïré a déposé une plainte devant le juge administratif pour, dans un premier temps, demander la suspension du procès-verbal de l'élection et, dans un second temps, son annulation pure et simple. La procédure de référé-suspension, c'est-à-dire le premier volet de l'affaire, a été examinée le vendredi 24 juin dernier à Ouagadougou par le tribunal administratif. Au terme d'échanges contradictoires entre les avocats des deux parties, la juridiction a affirmé qu'il n'y a pas de doute quant à la légalité du P-V en question et a par conséquent débouté la plaignante de sa demande de suspension.

Suite à la démission de Mathias Tankoano, l'intérim de la présidence du CSC, jusqu'à l'élection du 31 mai 2022, était assuré par le vice-président, Abdoulazize Bamogo. C'est pour empêcher que le président du Faso prenne un décret confirmant l'élection de celui-ci comme patron de l'institution que la plaignante, Marie Danielle Bougaïré, a saisi le tribunal administratif.

Selon elle et son avocat, Me Armand Bouyain, le nouveau promu ne pouvait pas se présenter à la candidature de la présidence du Conseil, puisqu'au moment du vote il était toujours vice-président du CSC. De leur avis, Abdoulazize Bamogo devait d'abord notifier sa démission de ce poste au chef de l'Etat. Chose que contestent les conseils de M. Bamogo qui estiment que cela n'est pas consacré par une loi et n'est pas une pratique habituelle au CSC.

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En effet, a engagé Me Séraphin Somé dès l'ouverture des débats, l'élection de M. Bamogo par ses pairs du collège des conseillers n'est qu'un acte préparatoire. Il prépare, a-t-il souligné, la prise d'une décision. Ainsi perçu, le recours de la partie demanderesse est hâtif.

Ce à quoi renchérit l'Agent judiciaire de l'Etat (AJE), pour qui il s'agit d'une élection et non d'une nomination. Par conséquent, l'élu Abdoulazize Bamogo n'est pas encore véritablement dans ses fonctions de président du CSC. Et de rappeler que Marie Danielle Bougaïré a effectivement pris part au vote du 31 mai 2022 et a été battue à la régulière par 5 voix contre 4. C'est a posteriori qu'elle a formulé sa plainte, ce qui reste inexplicable selon lui. Son concurrent, membre à part entière du collège des conseillers a été élu par lui. Les motifs sur lesquels se fonde la requérante ne sauraient donc prospérer, et elle doit comprendre que c'est le propre d'une élection de permettre la désignation d'un gagnant.

Me Armand Bouyain a affirmé que le consensus qui a toujours été privilégié au CSC s'était dégagé autour de sa cliente. Cette dernière apparemment n'avait pas d'adversaire, si on se réfère aux termes de la lettre de démission de l'ancien vice-président. Pour lui, il y aurait urgence d'éviter que celui-ci ne puisse poser des actes, alors qu'il n'est pas confirmé à son poste par le PF. L'avocat a dénoncé une certaine déloyauté qui a entouré l'élection du 31 mai dernier, et à l'en croire, il est inconcevable que le CSC ait à sa tête un président mal élu, qui viendrait, comme il l'a déjà relevé, à poser des actes préjudiciables à l'institution. Foi de Me Bouyain, le collège des conseillers n'est pas l'organe habilité à recevoir la demande de démission d'Abdoulazize Bamogo, mais plutôt l'autorité de nomination qu'est le PF lui-même.

De ce qui précède, Me Somé et l'AJE sont catégoriques. Aucun passage de la fameuse lettre de démission, comme veut le faire croire la défense de la plaignante, n'insinue une renonciation quelconque à la candidature au poste de président du CSC. D'où vient donc à Mme Bougaïré la conviction qu'elle était la seule et unique candidate au poste convoité ? Parlant de consensus, il ne serait peut-être effectif que dans l'esprit de la requérante et son préjudice n'est pas du tout grave.

Quid alors de l'urgence évoquée plus haut ? Il n'y aurait pas d'urgence, ou s'il y en aurait, ce serait celle de la nomination d'un président du Conseil. L'urgence de ne pas laisser le monde de la communication sans gendarme pour le réguler. Surtout par ces temps d'insécurité où tout le monde s'autoproclame spécialiste de tout. Me Somé considère la procédure engagée par Marie Danielle Bougaïré abusive.

Après une suspension de l'audience 20 minutes durant pour le délibéré, le tribunal à la reprise a soutenu n'avoir trouvé aucun grief sur le procès-verbal issu des élections du 31 mai 2022. Le juge a considéré que les arguments présentés par la défense de Mme Bougaïré ne sont pas suffisants et l'a déboutée de sa demande de suspension du P-V.

Pour Me Séraphin Somé, le tribunal n'a pas eu de difficultés à prendre sa décision, d'où son soulagement. Un savoureux soulagement, d'autant plus que cela permet d'avancer vers la nomination d'un président pour le compte du CSC et d'éviter un long vide institutionnel.

Quant au conseil de Marie Danielle Bougaïré, Me Armand Bouyain, il s'en tient pour le moment à la décision du premier jugement de l'affaire, mais se réserve le droit de faire appel. L'étape du référé franchie, on attend maintenant le jugement au fond. Annulera ? N'annulera pas ? C'est le wait and see.

Encadré

Le jugement rendu

" Le tribunal, statuant en référé en matière administrative et en premier ressort, en la forme, rejetons l'exception d'irrecevabilité tirée du caractère préparatoire de l'acte querellé, déclarons recevable la requête aux fins de suspension introduite par Mme Bougaïré Marie Danielle. Au fond, disons qu'il n'y pas de doute quant à la légalité du procès-verbal du 31 mai 2022, relatif à l'élection de M. Abdoulazize Bamogo comme président du Conseil supérieur de la communication ; en conséquence, déboutons Mme Bougaïré Marie Danielle de sa demande de suspension, déboutons le CSC et M. Abdoulazize Bamogo de leurs demandes de frais exposés et non compris dans les dépens, et mettons les dépens à la charge de la requérante. "

Extrait Tribunal Administratif De Ouagadougou

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