Afrique de l'Ouest: Pour une levée des sanctions de la CEDEAO - L'offensive diplomatique de bamako sera-t-elle payante ?

Les chefs d'Etats des pays de la CEDEAO
analyse

Le sommet des chefs d'Etat de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), prévu pour se tenir le 3 juillet prochain à Accra au Ghana, et qui se penchera sur les situations au Burkina Faso, au Mali et en Guinée, est très attendu du côté de Bamako.

En effet, après le rendez-vous manqué du 3 juin dernier où le Mali n'a pas pu bénéficier de la mansuétude espérée de l'instance sous-régionale en vue d'un allègement de ses sanctions, les autorités de Bamako semblent, cette fois-ci, plus que jamais décidées à obtenir la levée des sanctions au prochain sommet de la capitale ghanéenne, qui réunira, le dimanche prochain, les têtes couronnées de l'espace communautaire.

La stratégie consiste, dans un premier temps, à développer des initiatives à l'interne à travers des rencontres formelles ou non, auprès d'organisations de la société civile et de partis politiques pour avoir leur soutien afin de montrer un front uni face à la CEDEAO.

Dans un second temps, les autorités intérimaires du Mali ont entrepris d'aller à l'assaut des chancelleries à travers une offensive diplomatique qui a vu, dès le lundi 27 juin, le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, recevoir au grand complet, le corps diplomatique accrédité au Mali afin de le rassurer de leur volonté de ne pas se marginaliser dans l'espace communautaire.

De toute évidence, les sanctions de l'institution sous-régionale commencent à peser lourdement sur le Mali

Dans le même élan, des missions de bons offices seront envoyées au cours de la semaine à l'étranger, dans le but de plaider la cause du Mali afin d'obtenir l'indulgence de la CEDEAO. La question que l'on peut se poser est de savoir si cette offensive diplomatique des autorités de Bamako, sera payante. C'est, du moins, tout le mal qu'on leur souhaite. D'autant que, de toute évidence, les sanctions de l'institution sous-régionale commencent à peser lourdement sur le Mali dont l'économie n'est pas loin d'être à bout de souffle.

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En attendant, on peut se poser la question suivante : qu'est-ce qui fait tant courir la junte au pouvoir à Bamako si elle est sûre de répondre aux exigences de la CEDEAO ? La question est d'autant plus fondée qu'en fixant unilatéralement, par décret présidentiel, avant même la clôture des discussions, la durée de la transition à 24 mois là où la CEDEAO en attendait moins, le Mali a sans doute conscience de s'être mis dans une situation délicate.

Si l'on ajoute à cela, la nouvelle loi électorale controversée votée par le Conseil national de transition (CNT), l'organe législatif, et qui pourrait permettre à Assimi Goïta de se porter candidat à la prochaine élection présidentielle, il n'est pas difficile de se convaincre que Bamako a de quoi manquer de sérénité à l'approche de ce sommet crucial d'Accra.

Un sommet qui risque de marquer un tournant dans ses relations avec l'institution sous-régionale. Car, au regard de certains indicateurs, le Mali est au bord de l'asphyxie économique et toute décision autre qu'un allègement des sanctions de la CEDEAO, pourrait être catastrophique pour le pays qui n'échappe pas, par ailleurs, aux effets pervers de la guerre en Ukraine.

Les autorités de la transition de Bamako ont beau courir, il n'y a rien qui puisse mieux militer pour la cause du pays que leur bonne foi

Ceci expliquerait-il cela, et cette fébrilité et ce regain d'activisme des autorités maliennes, à l'approche de ce sommet d'Accra ? L'histoire le dira.

En attendant, il y a des raisons de croire que pour se donner les meilleures chances d'entrer dans les bonnes grâces de la CEDEAO, la junte militaire au pouvoir à Bamako gagnerait à jouer franc jeu sur toute la ligne, si tant est qu'elle soit vraiment animée du désir de nettoyer les écuries... d'Ibrahim Boubacar Keïta et de se retirer au terme du processus censé rétablir l'ordre constitutionnel sur les rives du Djoliba. Car, l'on a par moments l'impression qu'entre sa profession de foi et ses actes sur le terrain, il y a parfois comme de ces petits calculs politiciens qui pourraient entamer fortement la confiance des partenaires.

Sont de ceux-là, le décret de fixation unilatérale de la durée de la transition à 24 mois, mais aussi la promulgation de la nouvelle loi électorale controversée qui ouvre la voie à une éligibilité des acteurs militaires de la transition, là où la CEDEAO ne jure que par un pouvoir civil. Si c'est une façon détournée de couper l'herbe sous les pieds de l'institution sous-régionale en cherchant coûte que coûte à se maintenir dans le jeu politique, c'est une ruse de guerre qui pourrait être de mauvais effet pour le Mali.

Car, non seulement cela pourrait froisser la CEDEAO qui pourrait se sentir dupée, mais aussi c'est une démarche qui pourrait produire l'effet contraire chez un partenaire qui a pourtant envie de se montrer sensible aux souffrances des Maliens. C'est dire si les autorités de la transition de Bamako ont beau courir, il n'y a rien qui puisse mieux militer pour la cause du pays que leur bonne foi.

Et c'est sur ce terrain-là qu'Assimi Goïta et ses frères d'armes sont appelés à faire toutes leurs preuves et à montrer... godasse blanche, pour espérer tirer le Mali d'affaire et bénéficier d'une levée totale ou partielle des sanctions de la CEDEAO.

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