Sénégal: Déminage en Casamance - Près de 2 millions de m2 restitués aux populations

30 Septembre 2022

L'Agence nationale pour la relance des activités économiques et sociales en Casamance (Anrac) se déploie dans un espace qui porte encore les stigmates de quatre décennies de conflit armé. Son Directeur général depuis 2017, Ansou Sané, par ailleurs membre de l'Alliance pour la République (Apr), mesure, ici, cette lourde et exaltante charge et met en lumière les réalisations et défis à relever.

Le 21 septembre dernier, a été célébrée la Journée internationale de la Paix. Qu'évoque ce mot pour vous, fils de la Casamance ?

À l'instar de la communauté internationale, notre pays a célébré cet instant qui concourt à un même but : un monde en harmonie avec lui-même et dans l'acceptation de la différence, de l'autre. Nous sommes embarqués dans une même aventure qui peut être à la fois merveilleuse et tumultueuse. Mais, nous ne devons pas perdre de vue l'essentiel : ce qui nous lie. Cette journée est assez particulière cette année puisqu'elle intervient quelques semaines après la signature d'un accord de paix et de dépôt des armes entre l'État du Sénégal et le comité provisoire des ailes politiques et combattantes du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (Mfdc), le 4 août dernier, en Guinée-Bissau. Un autre jalon posé par le Président de la République, Macky Sall, qui va dans le sens d'une paix définitive. Ce processus de paix était irréversible et l'État du Sénégal n'a ménagé aucun effort pour qu'il aboutisse. Il faut donc que tous les fils de la Nation, surtout les acteurs politiques au-delà des petites appartenances, les autorités de toutes les sphères de sens, s'inscrivent dans cette dynamique dont peut légitimement tirer fierté le Chef de l'État pour son leadership et son action décisive. Nous ne pouvons consolider cette paix que dans l'unité et le progrès économique et social. Les actions du Président de la République ouvrent une ère prometteuse pour la Casamance.

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Comment l'Anrac, à travers ses missions, s'emploie-t-elle à consolider cette dynamique ?

L'Anrac a été créée en 2004 après les accords de paix signés entre l'État et le Mfdc. Parmi ses missions, il y a la coordination des interventions des acteurs présents en Casamance. Il faut le rappeler, à part la région de Dakar, Ziguinchor abrite le plus d'Ong, de structures qui accompagnent l'État dans l'assistance des populations déplacées, les réfugiés... afin d'atténuer les effets de la crise. Donc, il fallait une structure chargée d'harmoniser l'ensemble des actions pour parvenir à une meilleure articulation des interventions.

L'Anrac travaille également à la réintégration sociale et à la réinsertion économique des personnes impactées par le conflit. Il s'agit des personnes déplacées, quelquefois des réfugiés. À côté de cette exaltante tâche, il y a celle consistant à mettre en place un programme de développement économique à long terme de la Casamance, afin que la région revienne à ses standards de développement d'avant conflit. Tout cela est destiné à accompagner le processus de paix. Et depuis 2017, conformément aux instructions du Président de la République, nous nous attelons à mettre en œuvre sa vision et ses ambitions pour la Casamance.

Quels sont les résultats auxquels vous êtes parvenus ?

Dans le cadre de la coordination des actions, nous sommes parvenus à mettre en place un cadre stratégique d'intervention qui regroupe tous les acteurs intervenant en Casamance. Cela nous a permis de mettre en place, dans la plupart des zones de retour, notamment dans le département de Ziguinchor et un peu dans celui de Goudomp, des programmes intégrés de réintégration sociale et de réinsertion économique.

Depuis trois ans, grâce à cette accalmie résultant largement des opérations de sécurisation menées par l'Armée dans les zones de Niaguis, Goudomp et un peu récemment vers le nord Sindian, nous avons accompagné beaucoup de personnes candidates au retour à leur localité d'origine. Dans l'arrondissement de Niaguis, on a comptabilisé environ 652 ménages qui sont effectivement retournés et répertoriés dans 18 villages, soit 3179 personnes. À Goudomp, dans l'arrondissement de Djibanar qui est le plus impacté par le conflit, nous avons accompagné, en intelligence avec les maires et les Sous-préfets, huit villages, soit à peu près 165 ménages retournés à leur terre d'origine. Dans la zone de Niassia également, beaucoup de villageois sont revenus et ils ont bénéficié de l'accompagnement de l'Anrac, en plus des projets et programmes du Président de la République (Puma, Pudc, Ppdc).

C'est un accompagnement qui a porté sur des actions sociales, notamment des feuilles de zinc pour aider ces personnes à construire un habitat social. À côté de cela, nous avons accompagné la reprise des activités pédagogiques à travers la distribution de kits scolaires et un certain nombre de soutiens aux couches vulnérables, notamment les femmes qu'on a organisées sous forme de Gie avec des financements.

Par ailleurs, le Pudc a aussi accompagné cette dynamique en distribuant du matériel post-récolte, en travaillant à l'électrification rurale, en construisant des châteaux d'eau, des forages, des pistes de désenclavement, des postes de santé. Il en est ainsi du Puma et du Projet pôle de développement de la Casamance (Ppdc) qui a eu à accompagner des ouvrages hydroagricoles.

Qu'en est-il du déminage ?

Les mines ont charpenté un récit tragique. En plus de polluer les sols, elles ont créé une psychose. L'Anrac travaille avec le Centre national d'action anti-mines du Sénégal (Cnams). Ainsi, 1 932 000 m2 de terres a été déminé, dépollué et restitué aux populations. Aujourd'hui, il reste 1 200 000 m2 de superficie à déminer pour permettre à notre pays de se conformer à ses engagements dans le cadre de la convention d'Ottawa sur l'interdiction des mines et restes explosifs de guerre. Malheureusement, ces mines ont causé 831 victimes répertoriées dans la région de Ziguinchor et un peu celle de Sédhiou. Kolda, on peut le dire, est indemne. Au moment où nous parlons, les équipes du Cnams sont déployées dans la zone de Singhère Diola. Après, elles seront à Bissine, dans l'arrondissement de Niaguis, avant de poursuivre leur mission à Niassia.

Peut-on dire qu'il y a un environnement social et économique favorable à la paix et à l'envol économique de la Casamance ?

Les spécialistes du développement posent trois conditions qui doivent être réunies pour qu'une localité accède au développement. C'est d'abord le désenclavement, la question de l'énergie, qui est un important facteur de production, et la mise en place de mesures incitatives au progrès économique. Et en Casamance, ces conditions sont réunies. La condition indispensable, ici, était la paix. Aujourd'hui, avec les efforts consentis par le Gouvernement, nous avons pu poser ces préalables. L'accalmie est en train de se muer en paix définitive.

Pour ce qui est du désenclavement interne et externe de la Casamance, des avancées ont été notées. La Rn6 a été complètement réalisée, la Rn4 est en bonne voie. Le Promovilles fait son œuvre. Les autres projets de l'État ont permis d'avoir beaucoup de pistes favorisant l'écoulement des produits locaux et reliant les centres de production aux zones de commercialisation. Sur le plan du transport aérien, nous avons trois avions qui font la navette entre Dakar et Ziguinchor. L'extension et la modernisation de l'aéroport du Cap Skirring ouvre des perspectives alléchantes. L'aéroport de Ziguinchor est en cours de réhabilitation. Sur le plan du désenclavement maritime, il y a les deux navires, " Aguene " et " Diambogne ", avec une subvention des prix du transport. Le dragage du fleuve Casamance a été possible grâce au programme Orio, la Coopération hollandaise, en accord avec le Gouvernement, avec un financement de 21 milliards de FCfa. Cela a permis de draguer le fleuve sur une profondeur de sept mètres. Les gros navires débarquent ainsi au port de Ziguinchor qui a été réhabilité. La conséquence de cette mesure est la relance de la filière anacarde exportée à partir du port de Ziguinchor vers ceux du monde. En 2018, l'État avait pris une mesure qui consistait à arrêter l'exportation de l'anacarde à partir du port de Banjul. Cela a eu des effets positifs sur l'emploi et sur l'économie locale. En outre, le pont de Farafenni relie, aujourd'hui, le Sénégal à la Gambie, facilitant ainsi la traversée.

Sur le plan des mesures incitatives, il y a la loi portant érection de la Casamance en zone touristique spéciale d'intérêt national qui a contribué à faire de ce secteur un pourvoyeur de richesses et- d'emplois, accroissant ainsi l'attraction de la région. Par ailleurs, l'État déroule un important projet de mise en place d'Agropoles dans la zone d'Adéane pour lutter contre le pourrissement des fruits et créer les conditions de leur valorisation. On a noué un partenariat avec l'équipe de coordination de l'Agropole.

Les conditions sont réunies pour une paix définitive. L'Anrac a également recentré ses missions dans la relance du marketing territorial de la Casamance. À ce niveau, nous avons noué un partenariat avec l'Apix pour organiser des guichets mobiles qui permettent de rapprocher les acteurs publics des acteurs économiques.

L'Anrac a-t-elle les moyens de sa politique ?

La Casamance est une région qui a été éprouvée après un conflit de 40 ans. Les conséquences sont fâcheuses. Avec cette nouvelle situation moins trouble, le résultat a été un retour massif des populations vers leur localité d'origine. C'est une dynamique que nous accompagnons. L'État a mis à notre disposition des moyens, mais nous souhaiterions qu'ils soient renforcés pour nous permettre de nous déployer davantage sur le terrain. Les missions sont larges. L'Anrac est devenue le mur des lamentations des populations casamançaises. Mais, il faut dire que l'État déroule plusieurs projets et programmes destinés à améliorer le sort des populations casamançaises parce que le Président de la République aime la Casamance. Au-delà du discours et des considérations politiques, ses actions en témoignent largement.

Comment appréciez-vous les opérations de démantèlement des bases rebelles par l'Armée ?

Les opérations de sécurisation que l'Armée a menées à partir de janvier 2021 ont eu un impact extrêmement positif. Cela a favorisé le retour des populations et permis de neutraliser beaucoup de bandes armées (trafic de chanvre indien, coupe illicite de bois). Ce sont des bandes qui contrôlaient un certain nombre de territoires, empêchant ainsi les populations de vaquer à leurs occupations, notamment agricoles. Avant, l'Armée menait ce type d'opérations, mais la particularité, à partir de janvier 2021, est qu'elles sont suivies d'installation de cantonnements dans ces différentes zones. Cela a incité les populations à revenir. Nous travaillons avec l'Armée qui, en plus de ces opérations, mène des actions sociales au profit de ces populations à travers le concept armée-Nation.

Que vous inspire ce nouveau gouvernement dirigé par Amadou Ba ?

C'est un gouvernement d'action appelé à faire face à beaucoup de défis liés d'abord aux légitimes aspirations des populations dont le sort se situe au premier rang des préoccupations du Président de la République. Son louable bilan sur lequel il n'est jamais attaqué par l'opposition témoigne de cette noble ambition qu'il nourrit pour notre pays. Cette nouvelle équipe, dirigée par un homme compétent et dévoué en la personne d'Amadou Bâ, doit ainsi suivre ce sillon tracé par le Chef de l'État malgré une conjoncture internationale difficile qui affecte toutes les économies du monde. C'est une mission exaltante qui, j'en suis sûr, sera convenablement accomplie par ceux dont le Président de la République a honoré de sa confiance. Ce pacte de confiance, passez-moi la digression, a été rompu par certains députés de l'opposition qui n'honorent pas la démocratie. La rupture est déjà une vieille promesse jetée aux oubliettes. Ils gagneraient à avoir une posture plus commode pour l'intérêt des Sénégalais, si tant qu'il les préoccupe.

Que pensez-vous de la " bouderie " d'Aminata Touré qui a tourné le dos au groupe parlementaire Bby ?

Mme Aminata Touré convoque souvent l'éthique. J'ose espérer qu'elle soumettra son action à cette même éthique. Je l'invite à rendre à Bby son mandat de député. Il y a d'ailleurs, sur cette question, la jurisprudence bien établie, celle du Président Macky Sall. Pour un responsable en froid avec beaucoup de camarades, Mme Aminata Touré savait que ses chances de présider l'Assemblée nationale étaient minces. Beaucoup de députés avaient exprimé au Chef de l'État leur désapprobation du choix porté sur elle.

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