Afrique: Des ONG demandent l'annulation des appels d'offres de blocs pétroliers au Congo après la révélation d'un accord secret

communiqué de presse

Kinshasa, le 2 février 2023 - Une coalition d'ONG demande l'annulation immédiate des appels d'offres pétroliers et gaziers en République démocratique du Congo (RDC) suite à la révélation d'un accord secret entre le ministre des Hydrocarbures Didier Budimbu, un magnat nigérian des jeux sportifs, Chukwuma Ayodeji Ojuroye, et le cabinet d'ingénierie américain GeoSigmoid.

Selon Africa Intelligence, un accord signé à Paris en septembre 2021 réserve à Clayhall Group, une société de M. Ojuroye immatriculée aux Émirats arabes unis, deux blocs pétroliers en échange du préfinancement d'études géologiques par GeoSigmoid. Dans une lettre adressée au ministre l'année dernière, M. Ojuroye a souligné "la nécessité et l'urgence" de procéder à un appel d'offres séparé et restreint pour concrétiser le deal.

Cet arrangement secret réduit à néant la campagne de communication globale que mène M. Budimbu visant à promouvoir la transparence de l'appel d'offres hautement contesté. Il n'en a fait mention dans aucune de ses nombreuses conférences de presse, interviews ou tweets.

Selon le procès-verbal officiel du Conseil des ministres du 20 mai 2022, M. Budimbu a abordé l'accord de préfinancement ce jour-là sans révéler la clause garantissant des blocs pétroliers à Clayhall. GeoSigmoid avait présenté au Premier ministre les données préliminaires de seize blocs pétroliers au début du même mois.

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L'un des deux blocs que M. Ojuroye espère se voir attribuer est le bloc n°23, qui se trouve au cœur de la Cuvette Centrale, riche en tourbières, une bombe de carbone au centre des discussions globales sur le climat depuis une cartographie de la zone en 2017.

La loi congolaise autorise les appels d'offres pétroliers restreints, mais la condition que fixe la loi sur les marchés publics - portant sur la nature "spécialisée" des services requis - ne serait guère favorable à l'entreprise d'un magnat des paris en ligne.

La demande de la société civile de mettre fin aux appels d'offres et d'enquêter sur le deal secret est lancée par les ONG congolaises AICED, Dynamique Pôle, IDPE, MJPE, et REDD, ainsi que les ONG internationales 350.org, Banktrack, Greenpeace Africa, Oil Change International and Rainforest Rescue. Elle intervient cinq jours après l'annonce par M. Budimbu du report des dates limites de dépôt de manifestations d'intérêt, officiellement pour donner aux sociétés plus de temps à préparer leurs offres.

Le président de l'Assemblée Nationale, Christophe Mboso, doit :

mettre en place une commission d'enquête pour faire la lumière sur l'accord secret que le ministre des Hydrocarbures a signé avec Chukwuma Ayodeji Ojuroye.

Le président Félix Tshisekedi doit :

ordonner son ministre de publier l'intégralité des accords de toutes les entreprises qui appuient l'appel d'offres;

intervenir immédiatement pour annuler les appels d'offres.

FIN

Notes aux rédacteurs :

M. Budimbu a cherché à plusieurs reprises à dissimuler le fait que de nombreux blocs pétroliers en offre chevauchent des zones protégées, y compris le parc national de Virunga, inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO.

On ne sait pas sur quelle base légale il a ajouté 14 blocs à l'appel d'offres de juillet quelques jours seulement avant son lancement officiel. Plusieurs appels à manifestation d'intérêt indiquent de façon erronée qu'ils ont reçu l'approbation du Conseil des ministres. M. Budimbu a déclaré à Greenpeace Afrique qu'il s'agissait d'une "inadvertance".

En décembre, M. Budimbu a reconnu son intention de procéder à l'appel d'offres restreint convenu avec Clayhall et a promis que son financement des travaux de GeoSigmoid serait déduit de son bonus de signature - à supposer que son offre soit gagnante.

Les appels d'offres de blocs pétroliers et gaziers au Congo sont rejetés par de nombreuses communautés locales. Les scientifiques mettent en garde contre ses conséquences catastrophiques pour la biodiversité et le climat.

A l'échelle globale, qu'il s'agisse de campagnes récentes contre Total en France, contre l'exploitation pétrolière et gazière dans le bassin permien des États-Unis et dans les mers de Norvège, contre Shell en Afrique du Sud, Lamu et Decoalonize au Kenya et Recon Africa en Namibie, ou encore pour exiger des plus grands pollueurs britanniques qu'ils remboursent les pertes et dommages subis, Greenpeace s'engage à protéger les communautés locales et la nature, ainsi que la planète confrontée à une crise climatique qui ne cesse de s'aggraver.

Pour suivre une trajectoire compatible avec une température de 1,5°C, les Nations unies affirment que le monde devra diminuer la production de combustibles fossiles d'environ 6 % par an jusqu'en 2030 et l'Agence internationale de l'énergie prévient que le monde ne peut pas ajouter un projet de combustible fossile de plus.

Pour plus d'informations, interviews ou images de la forêt du Bassin du Congo :

Tal Harris,

coordinateur international des communications à Greenpeace Afrique [email protected]

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