Au Tchad, après des années d'attente pour beaucoup dans une misère totale, entre 70 et 80% des près de 10 700 victimes de Hissène Habré ont déjà selon une plate-forme qui regroupe trois associations de victimes de sa présidence entre 1982 et 1990, été indemnisés depuis la mi-février par le gouvernement tchadien, qui a décaissé une somme de 10 milliards de francs CFA. Chaque victime ou ayant-droit a donc reçu une indemnité de quelque 920 000 francs CFA, environ 1 400 euros.
On est loin, très loin, des 150 milliards de francs CFA que la cour criminelle de Ndjamena en 2015 et la cour spéciale africaine de Dakar en 2017 avaient accordé au total aux victimes de Hissène Habré, en guise de réparations pour le préjudice subi.
Les 10 milliards disponibilisés par le gouvernement tchadien aujourd'hui ne représentent donc qu'un peu plus de 10% des indemnités fixées dans les deux procédures judiciaires, mais c'est un geste très important qui étaient attendus depuis très longtemps par ces victimes.
« Les victimes de Hissène Habré se sont battus sans relâche pendant 25 ans pour que le dictateur et ses sbires soient traduits en justice, rappelle Reed Brody a été l'un des principaux initiateurs du procès Habré. Cet argent ne représente qu'une petite fraction qui leur était attribuée par les tribunaux. Mais pour les victimes qui ont attendu si longtemps et qui sont dans une situation désespérée, ce paiement fait déjà une énorme différence dans leurs vies. »
Cette somme a soulagé un tant soit peu les victimes. Maintenant, on est en train de chercher à obtenir une deuxième opération. C'est ça notre préoccupation, parce qu'hier, ils n'avaient pas d'espoir. Ils étaient désespérés et cette opération a fait renaître l'espoir.
Esdras Ndikumana Le gouvernement tchadien doit faire un effort supplémentaire, car ces 10 milliards ne représentent, toujours selon Reed Brody qu'un cinquième de la somme que devra débourser l'état tchadien pour l'indemnisation des victimes de Habré. Le reste des 150 milliards ? Le tribunal spécial de Dakar avait chargé l'Union africaine (UA) de créer un fond fiduciaire qui devait mobiliser ces fonds. Mais cela n'a pas encore été fait, huit ans après ce procès.