Il y a un temps pour tout, dit le célèbre adage. C’est bien ce que semble avoir compris l’essentiel des acteurs de la vie politique en Côte d’Ivoire, du moins ceux qui prétendent à briguer le suffrage des électeurs lors de la prochaine présidentielle qui aura lieu le 25 octobre 2025.
A sept (7) mois de l’échéance, c’est le moment choisi par une partie importante de l’opposition ivoirienne pour dévoiler sa stratégie, face à un président sortant dont tout chez lui ne laisse augurer sa non-candidature à un 4ème mandat.
L’enjeu pour cette opposition qui curieusement a « exclu » de ses rangs une figure emblématique qu’est Laurent Gbagbo, le président du PPA-CI qui a déjà annoncé sa candidature malgré les menaces d’inéligibilité qui pèsent sur lui, donne une lecture singulière de la nouvelle configuration de l’espace politique en Côte d’Ivoire.
En effet, si cette tendance se confirme, on aura fatalement une triangulaire dans la compétition électorale. Ce sera inédit, car le jeu politique en Côte d’Ivoire a souvent été marqué plus ou moins par une bipolarisation entre deux grandes forces ou coalitions politiques, du moins au vu des scores.
Cette recomposition qui s’amorce ne s’est d’ailleurs pas faite de manière réfléchie ; mieux, elle a été dictée par un mouvement presque simultané au sein des différents regroupements politiques, tant au PDCI-RDA qu'au RHDP au pouvoir, et aussi au FPI qui a volé en éclats après les candidatures annoncées de Gbagbo, Simone Ehivet ex-Gbagbo, et Pascal Affi Nguessan.
Face à cette dispersion des forces, des calculs savants sont faits, face à l’éventualité d’une candidature de Ouattara, qui seul sous la bannière de ce qui restera du RHDP, ou avec ses alliés éventuels, peut créer la surprise et faire le plein dans son camp au premier tour.
Pour conjurer cette menace, l’opposition a vite mis en place une coalition pour l’Alternance Pacifique en Côte d’ivoire (CAP. Côte d’ivoire) autour de 15 formations politiques, ce 10 mars au siège du PDCI à Abidjan.
Cependant, la nouvelle coalition CAP Côte d’Ivoire qui d’emblée s’est affirmée non idéologue inspire de prime abord deux lectures.
En effet, le trait d’union de ces partis politiques, à savoir le processus électoral, a très vite fait consensus sur le besoin de sa fiabilisation ; question qu’un seul parti ou un seul candidat seul ne peut porter, et qui peut être la principale source de lendemains électoraux agités, si elle n’est pas réglée. Or le président de la Commission Electorale Indépendante (CEI) ne semble pas être de cet avis, d’autant qu’il aurait souhaité que la révision des listes se fasse après les élections.
Il s’y ajoute que la CAP Côte d’Ivoire, du point de vue de sa composition, se présente comme un cheval de Troie pour le candidat Tidjane Thiam, candidat du PDCI non encore investi, qui d’ailleurs a été l’hôte de la réunion qui a, à son siège, porté sur les fonds baptismaux ladite coalition. Une manière pour lui de « forcer la main » à ceux qui, dans son parti, manifestent des velléités de réticence par rapport à sa candidature.
Ensuite, la légitimité que lui donne le simple fait de convier tout cet aréopage de leaders et le fait qu’il soit nommé coordonnateur national de la CAP lui donne une avance sur une éventuelle candidature de l’opposition unifiée autour de sa personne. Disons-le tout net, le PDCI dispose d’un appareil politique d’envergure nationale et jouit d’un excellent maillage du territoire.
En l’absence de Laurent Gbagbo dans cette coalition (même si son éligibilité n’est pas acquise à cause de ses condamnations pénales non encore vidées), on peut espérer que les discussions autour d’un candidat, qui d’ailleurs nesont pas encore à l’ordre du jour (mais se feront incidemment), seront moins compliquées.
Reste maintenant à voir si la question du fichier électoral dont l’opposition souhaite l’élargissement à de nouvelles inscriptions d’une part, et de l’autre la possibilité pour tous les candidats de se présenter à l’élection, pourra être réglée avant les élections voulues comme apaisées d’ici octobre 2025.