Guinée: Arrestation de Claude Pivi au Libéria, apres 10 mois de traque - Au nom de la justice et du bon voisinage

18 Septembre 2024
analyse

Il n'y a plus aucun doute, Claude Pivi dit Coplan et son fils Verny Pivi ont été, après dix mois de traque, arrêtés au Libéria voisin, et des tractations seraient déjà en cours entre les autorités guinéennes et libériennes en vue de leur extradition à Conakry.

L'information a été, du reste, confirmée hier après-midi par l'avocat de Claude Pivi, Me Abdourahmane Dabo, mais rien a encore filtré sur les circonstances exactes de cette arrestation de "l'As de pique" de l'armée guinéenne sous le régime de Lansana Conté et de celle de son fils. Certaines sources affirment qu'ils auraient été alpagués dans un village du Comté de Nimba, au Nord du Libéria, qui jouxte la Guinée forestière, d'où les fugitifs sont originaires.

D'autres par contre, disent qu'ils ont été appréhendés suite à un banal contrôle routier à Monrovia, et seraient à l'heure où vous lisez ces lignes, gardés sous haute sécurité dans les locaux de la police en attendant leur transfèrement dans les prochaines semaines en Guinée. Le doute sur le lieu de leur capture subsiste encore, d'autant qu'aucun témoin direct n'a jusqu'ici raconté par le menu le déroulement de l'opération, qui a été sans doute facilitée soit par la collaboration des populations locales, soit par l'appât du gain qui a dû l'emporté sur l'allégeance tribale ou familiale, la tête de colonel Pivi ayant été mise à prix à hauteur de 500 millions de francs guinéens.

En tout état de cause, cette fin de cavale de cet officier redouté pour sa brutalité et sa bouffonnerie, et de son téméraire de fils considéré comme le cerveau de l'opération commando qui a permis son évasion spectaculaire de la Maison centrale de Conakry le 4 novembre dernier, est, depuis son annonce, ressentie par les familles des victimes des événements du 28 septembre 2009, comme un véritable soulagement.

Cette fin de cavale pourrait ouvrir les portes de la réconciliation nationale

C'est en effet, une étape importante vers la reddition des comptes de celui qui, le 31 juillet dernier, a écopé de la plus lourde peine au terme du procès des événements du 28 septembre, après que le tribunal criminel de Dixinn l'a déclaré coupable des faits de crimes contre l'humanité. Il rejoindra ainsi, du moins sauf extraordinaire retournement de situation, sa cellule de la Maison centrale pour y purger une peine de réclusion criminelle à perpétuité, assortie d'une période de sûreté de 25 ans.

Chapeau bas à tous ceux qui ont oeuvré pour ce « bolibana » (fin de course) de celui qui est tantôt décrit comme un combattant patriote et courageux, tantôt comme un pervers narcissique, car il pourrait ouvrir les portes de la réconciliation nationale en pansant les plaies des victimes des événements douloureux qui ont rythmé la vie politique en Guinée ces dernières décennies et auxquels il a pris une part active.

Cette réconciliation toujours souhaitée entre Guinéens, mais malheureusement jamais réalisée, pourrait avoir un début de commencement avec le réaménagement des lourdes peines infligées aux "fils de la forêt" au terme du procès du 28 septembre, malgré la gravité des faits dont ils se sont rendus coupables, et nonobstant la tentative désespérée du colonel Coplan d'échapper à la justice en se faisant la belle suite à l'opération d'exfiltration rondement menée, à visage découvert, par son fils il y a dix mois de cela.

Au nom de la restauration du tissu social et de la construction d'une paix durable dans ce pays plusieurs fois victimes de graves violations de droits de l'homme, il est impérieux, en effet, de promouvoir la justice transitionnelle qui permet à la fois d'établir les responsabilités dans les récurrents cycles de violences qui l'ont endeuillé, et de pardonner possiblement les coupables, en appliquant le tryptique vérité-justice-réconciliation.

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