Les élections législatives du 17 novembre 2024 auront ceci d’inédit, au-delà du nombre très élevé des listes, 41 au total, qu’elles vont boucler un processus d’alternance au sommet du pouvoir d’état.
L’Assemblée nationale va être renouvelée au terme de l’élection législative anticipée, pour ouvrir la voie, si les tendances se confirment, à la mise en place de la Haute cour de justice, appelée à juger les dignitaires de l’ancien régime.
Pour autant cette élection présente une certaine incongruité liée au fait que les « identifiants » des entités qui sont en compétitions restent à tout le moins très flous. Autrement dit, d’une élection à l’autre les électeurs sont pris dans un tourbillon de coalitions, voire de candidature qui ne renvoient à aucune réalité politique de terrain. Par exemple entre les dernières législatives et aujourd’hui, Benno Bokk Yaakaar (BBY) et Yewwi Askan Wi (les deux grandes coalitions au Parlement) ont disparu de la scène politique, entrainant dans leur « chute » Taxawu Sénégal, Rewmi, Aar Sénégal, le PDS.
On me dira que les différentes crises de croissance pour les uns, de légitimité pour les autres sont passées par là. Mais l’enjeu n’est pas dans le fait de participer à cette élection, comme certains le veulent, bloquer l’avancée du Pastef, dont le candidat cherche une majorité qualifiée à l’Assemblée nationale pour consolider son projet, qui lui a valu le vote de 54, 28¨% des voix de l’électorat sénégalais.
Mais en vérité, ces élections auront certainement pour challenge un taux de participation très élevé, par rapport à la présidentielle pour la confirmer, avant même celui de l’amplitude du score du vainqueur.
De ce point de vue ce n’est pas gagné d’avance, car il y a plusieurs raisons à cela. D’abord, le manque de lisibilité des listes en compétition est un sérieux handicap. En effet, les noms de coalitions en compétition « Taku Wallu » « Jamm Ak Njarin » « Sénégal Késsé » « Samm Sa Kaddu », « Dundu, etc., ne renvoient à aucune réalité politique au niveau de l’opinion, sinon une constellation de responsables « dits tête de liste », dont la plupart sont des novices en politique (quoique parfois porteurs de bonnes idées) où contre toute attente, une « alliance contre nature » des entités politiques naguère en hostilité ouverte .
Il y a certes un déficit global de communication lié en partie aux délais raccourcis de la campagne, qui laissent l’électeur à la merci de toute sorte d’erreur de vote face à 41 listes, à travers lesquelles il faut trier pour faire la bonne pioche.
Tous auront –ils cette patience et cette connaissance des candidats, qui le moins qu’on puisse dire tiennent très peu de discours programmatique, et lorsque c’est le cas, on a l’impression d’être dans une campagne présidentielle, où on promet monts et merveilles.
Excepté le « Pastef » au pouvoir, connu dans l’espace politique comme parti ayant un passé électoral, et qui a préféré garder son identité visuelle et son nom pour aller aux législatives, un peu moins le PDS dit « authentique » SOPI Sénégal (une scission du parti du président Abdoulaye Wade) toutes les entités en lice, en coalition ou en inter coalition feront face au finish à un véritable problème de la dilution de leur identité, voire de lisibilité pour les électeurs jusque-là habitués à voir les leaders en pôle position sous des bannières connues.
La conséquence peut être double. Soit, faute de voir ses préférences électorales initiales dans le jeu électoral, notamment les leaders classiques, la tentation de l’abstention est réelle, des lors que la localité n’a aucun investi à une position qui peut lui valoir une élection.
A l’inverse, à défaut d’une candidature présente et connue c’est le basculement vers le clan du pouvoir, ou le vote utile serait alors victorieux, et certainement pourrait sceller le sort des autres listes en compétition, avec en perspective une majorité écrasante. Le parlement reflèterait ainsi le résultat de la présidentielle, avec une majorité écrasante et une minorité composée de 2 à trois coalitions de l’opposition.
Il reste encore à peu près 10 jours de campagne, qui jusque-là est émaillée d’actes de violences. Les prochains jours pourront confirmer ou infirmer les tendances lourdes qui positionnent « Pastef » avec plus d’une majorité absolue.