L'EPC, une plateforme mise en place par AFREXIMBANK, ambitionne de permettre aux entreprises africaines de soumissionner avec succès, de gagner et d'exécuter des marchés d'infrastructures en Afrique. Intéressant à plus d'un titre, le programme a cependant été challengé par des représentants du secteur privé qui, au cours d'un atelier d'échange, organisé, mercredi 4 décembre 2024 dans le cadre de l'Africa Investment Forum (AIF) qui se déroule actuellement à Rabat (Maroc), n'en ont pas moins exprimé leurs préoccupations.
Le Programme de promotion des contrats d'ingénierie, d'approvisionnement et de construction (EPC) intra-africains a été lancé par la Banque Africaine d'Import-Export (Afreximbank) en 2023 pour remédier à la participation limitée des entrepreneurs africains aux dépenses annuelles d'infrastructure de 60 milliards de dollars américains du continent. Au cours d'un atelier organisé, le mercredi 4 décembre par Afreximbank dans le cadre de l'Africa Investment Forum (AIF) qui se déroule actuellement à Rabat (Maroc), ledit programme a été présenté afin de donner une meilleure audience auprès des entrepreneurs africains.
Aussi le programme EPC-Platform de Afreximbank vise-t-il, selon M. Ayman El Zogbhy, Directeur du financement institutionnel à Afreximbank, « à aider les sociétés africaines à porter leur empreinte en Afrique, en leur fournissant des informations de marché, des services de financement mais surtout les outiller pour gagner des marchés. » Ainsi que l'a expliqué Anthony Koeman, département recherche de Afreximbank, l'idée est partie du constat par Afreximbank, que beaucoup d'entrepreneurs en Afrique arguent de leur ignorance des projets d'infrastructures et des procédures d'appels d'offres, ainsi que leur manque de capacités techniques et financières par rapport aux exigences. A contrario, du côté des agences publiques qui offrent des contrats, l'une des raisons avancées pour justifier la faible participation des entrepreneurs africains aux projets de construction, est liée à leur ignorance d'entreprises capables d'exécuter les marchés. « Pour nous ça a été absolument choquant », estime M. Koeman.
D'autant plus choquant que le secteur de la construction en Afrique représente environ 175 milliards de dollars et devrait enregistrer une croissance de 9% d'ici à la fin de l'année et dans dix ans, il est attendu un doublement en valeur de ce secteur, pour atteindre près de 400 milliards de dollars. Dans ce contexte, la plateforme arrive, selon Afreximbank, comme une solution stratégique et efficace visant à relever les trois grands obstacles qui empêchent l'Afrique de réaliser son potentiel, à savoir le manque de financement, l'insuffisance d'informations et le déficit de compétences. Il apparaît particulièrement important de relever ces défis pour faire face au déficit de financement des infrastructures sur le continent, estimé à 170 milliards de dollars US par an, qui pourrait être comblé en promouvant la coopération internationale et en attirant les investissements dans les infrastructures.
Il a été ainsi a préconisé la promotion d'une communication transparente entre les gouvernements et le secteur privé afin de combler les lacunes en termes d'information et de compétences, en apportant un soutien technique, en renforçant les capacités et en développant les compétences afin de créer une main-d'oeuvre qualifiée. Pour être concret, la plateforme est désormais reliée au portail du Ministère de la Coopération Internationale pour l'implication du secteur privé.
Au cours des cinq dernières années, Afreximbank a apporté son soutien aux entreprises EPC en Afrique à travers des contrats d'une valeur de plus de 12 milliards de dollars US.
EPC ?
Les contrats EPC sont très répandus au sein de l'industrie de la construction et de l'ingénierie industrielle. Leur rôle principal est d'organiser et de répartir entre les différents acteurs d'un projet, chacune des tâches qu'exige la réalisation : identification des partenaires, études, exécution des travaux, approvisionnement, livraison...
L'EPC peut être défini sous une forme d'entente contractuelle qui sera utilisée entre deux parties : l'industrie ou MOA, et le contractant en fonction du secteur d'activité concernant l'offre. On retrouve ce type de contrat en particulier au sein des entreprises de génie civil, de l'énergie, des mines ...
Le MOA fournit au contractant EPC les spécifications techniques et fonctionnelles du projet, et ce dernier a en charge de réaliser l'ensemble des tâches (conception, approvisionnement, mise en opération...) pour livrer le projet dans un état opérationnel à son client. La spécificité du contrat EPC c'est que le contractant s'occupe de l'ensemble du projet, de l'installation, des matériaux nécessaires puis de la réalisation soit directement soit en sous-traitant une partie des travaux. Il porte la responsabilité du projet. Le responsable du projet (MOA) en contrat EPC fournit au contractant une conception détaillée comprenant des spécifications techniques et fonctionnelles lui permettant de construire et de livrer le projet, dans un délai spécifié. C'est pour cette raison que les contrats EPC sont souvent appelés « projet clé en main ».
La nécessaire stratégie du regroupement
Le panel qui s'est déroulé sur le thème « Défis, opportunités et solutions EPC en Afrique », a suscité des discussions durant lesquelles les entrepreneurs ont exprimé leurs préoccupations et inquiétudes. Le principal défi pour les entreprises africaines c'est d'acquérir les capacités pour bien structurer des propositions. L'initiative de Afrieximbank a été jugée salutaire. Cependant, beaucoup ont déploré l'absence d'harmonisation entre les pays relativement aux normes et procédures qui pose un réel problème. Pour la plupart des intervenants, le grand défi reste financier et face à la puissance des entreprises chinoises, mais aussi européennes, il n'y a pas de concurrence possible dans l'état actuel.
Du point de vue du tunisien M. Anis Jaziri, président de Tunisia Africa Business Concil, la solution pour les entreprises africaines, c'est de se rassembler pour aller à la conquête des marchés. « Nous, nous avons proposé des regroupements et nous avons lancé une initiative qui s'appelle IGAD avec les égyptiens, dans divers secteurs. Nous essayons de trouver et faire des levées de fonds et ça commence à marcher », assure-t-il.
Cette nécessité de regroupement des entreprises s'ajoute à celle de l'acquisition de la technologie et de l'ingenieuring. Dans la supervision des travaux, par exemple, au Zimbawe, quand l'Etat fait un appel d'offres, il n'a pas les ressources pour financer. Dès lors ce sont les entreprises d'ingenieuring qui financent et cela renchérit les coûts. Mais le meilleur exemple est venu de cet entrepreneur qui demande : « Pourquoi avez-vous recruté une entreprise indienne pour construire le siège de Afrieximbank ? »...