Mali: Joliba TV n'est plus suspendue que pour six mois, la profession reste mobilisée

Joliba TV a cessé d'émettre le 26 novembre dernier, sa licence lui ayant été retirée après la diffusion d'un débat au cours duquel la véracité d'un supposé coup d'État déjoué au Burkina avait été mise en doute. Les journalistes maliens s'étaient unanimement mobilisés contre cette « atteinte à la liberté d'expression ». Mardi 17 novembre, la HAC a révisé cette sanction à la baisse, n'infligeant plus que six mois de suspension à Joliba TV. Un recul notable, mais qui ne suffit à satisfaire ni la chaîne, ni la profession.

La direction de Joliba TV a reçu la notification de la HAC mardi dans la soirée. La chaîne, qui avait initié une procédure de recours, conserve finalement sa précieuse licence mais reste suspendue pour six mois. Une « réduction de peine » obtenue par la Maison de la presse du Mali, qui rassemble les organisations de journalistes du pays, et qui avait allié menaces publiques de mobilisation générale et médiation discrète et apaisée auprès de la HAC.

Ce recul de l'autorité malienne de régulation, sur un dossier clairement politique et suivi de près par les plus hautes autorités de la Transition, est une première victoire. Première seulement, car elle ne suffit aucunement à éteindre la colère, ni de la rédaction de Joliba TV, ni de l'ensemble de la profession.

« Six mois de suspension pour rien », déplore un cadre de la chaîne privée malienne, alors que l'arrêt des programmes pèse lourdement sur l'entreprise et ses salariés. Mais c'est surtout le principe même de la sanction qui suscite la colère : « Mon indignation est indescriptible, commente ce journaliste, c'est la fin programmée des médias. »

« Défendre coûte que coûte la liberté d'informer »

« Cette suspension est sévère et ressemble à une décapitation médiatique, abonde un autre journaliste phare. Elle vise à réduire à néant la capacité de la chaîne à informer et à débattre. C'est un coup brutal qui frappe une équipe dévouée mais aussi un espace d'expression citoyenne. »

« Joliba TV refuse de disparaître, réagit enfin un autre cadre de la rédaction, mais malgré les conséquences économiques déjà très graves pour la chaîne, malgré tous les obstacles, la télé restera debout, déterminée à résister et à défendre coûte que coûte la liberté d'informer. »

Objectif : « réouverture immédiate »

Même intransigeance du côté de la Maison de la presse du Mali : « Nous voulons mieux que ce qui est proposé », indique un responsable de l'organisation faîtière de la profession, seule une réouverture immédiate est acceptable. »

L'heure est donc toujours à la mobilisation pour défendre Joliba TV et, derrière elle, le pluralisme des médias, la liberté d'opinion et la liberté d'expression au Mali. Une réunion extraordinaire est convoquée ce samedi 21 décembre par la Maison de la presse pour débattre des « décisions à prendre » dans le cadre de la « gestion de l'affaire Joliba TV - HAC ».

Sollicitée par RFI, la Haute autorité malienne de la communication n'a pas donné suite.

Ce sont les propos tenus lors d'une émission de débat sur Joliba TV par Issa Kaou N'Djim qui avaient déclenché l'affaire. L'homme politique et médiatique malien avait jugé que les images, présentées le mois dernier par la télévision d'État burkinabè RTB comme un flagrant délit de tentative de coup d'État, ressemblaient à un « montage » - au sens de « mise en scène » - « même pas professionnel », visant à « détourner l'attention de l'opinion des vraies questions ». Des paroles qui lui valent d'être en prison depuis plus d'un mois. Placé sous mandat de dépôt le 13 novembre, Issa Kaou N'Djim sera jugé en février pour « offense commise publiquement envers un chef d'État étranger ».

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