Au Mali, 25 lieux de la capitale changent de nom pour réaffirmer la souveraineté du pays. Mais aucune femme ne figure sur la liste des nouveaux noms.
Au Mali, 25 lieux de la capitale Bamako, dont des boulevards, avenues, rues, places publiques et établissements publics, changent de nom. Une annonce faite à travers un décret pris lors du Conseil des ministres de mercredi dernier (18.12). Un acte qui traduit la volonté des militaires au pouvoir d'en finir avec l'époque coloniale.
Depuis la rupture de ses relations avec la France et les autres partenaires européens, le chef de la junte, le désormais général Assimi Goïta, multiplie les actes allant dans le sens de la réaffirmation de la souveraineté du pays. Une rebaptisation qui ne fait néanmoins pas l'unanimité dans le pays, où des voix critiques dénoncent la mise à l'écart de certains acteurs clés de l'histoire du Mali, à commencer par les femmes.
Aissata Bocoum, présidente de l'association Yeleen pour la promotion des droits des femmes et des filles, regrette qu'"aucune femme ne figure sur la liste. En même temps, on ne peut pas dire qu'il n'y a pas eu de figures féminines emblématiques au Mali. Il y a eu beaucoup de femmes qui se sont battues pour les droits des femmes, beaucoup de femmes qui se sont battues pour l'émancipation des femmes, pour que l'avènement d'un Mali nouveau soit une réalité. C'est désolant et c'est vraiment décevant".
Une démarche trop hâtive
Signe des tensions actuelles entre les autorités de Bamako et la Cédéao, ou encore avec l'ancienne puissance coloniale, la place du sommet Afrique-France, située sur la route de l'aéroport de Bamako, devient la place de la Confédération des Etats du Sahel, l'avenue de la Cédéao a été renommée avenue de l'AES, l'Alliance des Etats du Sahel.
La rue Archinard, une ancienne figure de l'administration coloniale française, prend désormais le nom de rue El Hadj Omar Tall, considéré comme un des plus grands résistants face à la conquête coloniale.
Selon Sékou Niamey Bathily, porte-parole du Rassemblement pour le Mali, l'ex-parti au pouvoir, les noms de certaines figures, comme celles qui ont contribué à l'avènement de la démocratie au Mali, auraient aussi mérité de figurer sur la liste.
"On aurait dû donner encore plus de temps à la commission de travailler sur ces dénominations, estime-t-il. On pouvait aussi permettre d'élargir le champ aux capitales régionales et ne pas s'arrêter qu'à Bamako, surtout qu'il y a des édifices un peu partout au Mali qui entrent dans la gestion de l'Etat. Il y a des universités dans les régions, des hôpitaux et d'autres choses".
Le Mali fait comme le Niger et le Burkina
Mais pour Mohamed Traoré du Mouvement résistance citoyenne, une organisation de la société civile qui soutient la transition, la rebaptisation des rues et autres avenues se justifie :
Il pense que "les autorités sont engagées pour l'autodétermination, la défense de la souveraineté. Cette initiative ne peut que renforcer la demande du peuple malien autour de l'enseignement de nos valeurs sociétales et ancestrales dans les établissements publics et scolaires".
Avant le Mali, le Niger et le Burkina Faso, les deux autres pays de l'AES, avaient également procédé, au nom de la réaffirmation de leur souveraineté, à la nouvelle nomination de rues ou places publiques.