Les fêtes de fin d'année sont traditionnellement synonymes d'une hausse de la consommation. Les derniers chiffres de Statistics Mauritius publiés mercredi dernier confirment cette tendance, évoquant une hausse de 24 % des prix de produits importés en octobre par rapport à 2023.
La valeur des produits alimentaires et des animaux vivants est passée de Rs 4,2 milliards en octobre 2023 à Rs 4,8 milliards en octobre 2024. Une hausse notable est également observée dans l'importation de boissons et de tabac, dont la valeur est passée de Rs 298 millions en octobre 2023 à Rs 557 millions en octobre 2024. Les importations de la Chine ont augmenté pour la même période de Rs 3,9 milliards à Rs 5,1 milliards en octobre 2024. Malgré ces chiffres, les commerçants ne s'attendent pas à une augmentation significative de la consommation. Selon eux, les consommateurs resteront prudents.
Au moment où nous avons échangé avec des gérants de commerces, ils s'affairaient à remplir leurs stocks en prévision du flux de clients attendu après le paiement du 13e mois aux employés. Nooreza Fawzee, directrice financière de la chaîne Dream Price, indique qu'aucun changement notable n'a été observé dans la fréquentation des supermarchés. «Tout est normal et très calme», affirme-telle, en précisant que les stocks sont consolidés en vue des deux semaines restantes, qui s'annoncent très animées avec l'afflux de clients.
Concernant les tendances de consommation, elle dit anticiper une hausse dans les achats de chocolat, sucreries, boissons gazeuses et produits surgelés par rapport à l'an dernier. Malgré une augmentation des revenus, elle note que les consommateurs restent plus prudents, bien que les Mauriciens aiment célébrer en famille. Pour diversifier l'offre, de nouvelles marques ont été importées afin de satisfaire la clientèle. Cependant, Nooreza Fawzee estime que les véritables tendances de consommation se dessineront une fois les 13e et 14e mois versés aux employés.
Chez Intermart, les stocks ont également été renforcés pour répondre à la demande des clients. Cependant, cette année, aucune nouvelle marque n'a été importée pour élargir le choix des consommateurs. «Les Mauriciens ont leurs habitudes et ne vont pas les changer», explique Ignace Lam, directeur de la marque. Selon lui, «aucun changement n'est noté» dans les tendances de consommation pour l'instant. «La période festive a commencé, mais tout est encore relativement calme.»
Ignace Lam estime, par ailleurs, que le paiement des 13e et 14e mois n'aura pas de grosse incidence sur la consommation. «Depuis quelques années, les ventes pour la période festive débutent très tard. Je pense que cela est lié au paiement des bonis, notamment du 14e mois. Les gens préfèrent avoir cet argent en main avant de dépenser.» Bien que les revenus soient plus élevés, ajoute-t-il, cela ne signifie pas que les clients les dépenseront dans les produits alimentaires. «Il est possible que cet argent soit utilisé pour acheter des produits plus durables», avance-t-il. Quant aux promotions, en comparant les prix de décembre 2024 à ceux de décembre dernier, Ignace Lam affirme que les prix sont restés stables malgré une hausse continue des coûts.
Des achats beaucoup plus réfléchis
Le 13e mois, ainsi que le 14e mois, qui sera versé aux travailleurs touchant moins de Rs 50 000, pourrait offrir une marge plus importante pour les dépenses de consommation. Mais beaucoup font attention. Lors de notre visite dans des supermarchés, les caddies se remplissaient lentement, car le 13e mois n'avait pas encore été versé. Un père de famille résidant dans un faubourg de la capitale, venu avec son épouse et ses deux fils dans un petit supermarché près de chez lui, se contente d'acheter «ce qu'il faut» sans excès.
«Je préfère être plus prudent dans mes achats, même si un surplus de revenus est prévu. La situation économique, comme nous l'avons appris, n'est pas favorable. Je ne pense donc pas consommer davantage, car tout est cher. Et le 14emois, pour moi, c'est une illusion. Nous vivons dans une illusion monétaire. Une personne peut percevoir Rs 100 000 par mois, mais dépenser cette somme demande beaucoup de réflexion», explique-t-il. Malgré l'augmentation des revenus, il estime que cela ne justifie pas un endettement accru. Par ailleurs, il souhaiterait qu'un prix de vente maximum soit fixé à Maurice, comme c'est le cas en Inde.
Cindy F., mère de famille, habitant à Roches-Brunes, que nous avons rencontrée dans un supermarché sur la route Royale à Beau-Bassin, nous confie : «Cette année, avec le 14e mois, c'est vrai que mon mari et moi avons un peu plus de marge pour les dépenses de fin d'année. Cependant, avec la roupie qui n'a plus de valeur, ce bonus sera vite absorbé dans les dépenses habituelles.
Aujourd'hui, avec Rs 100, on n'a plus grand-chose. Comme les prix sont toujours en hausse dans les supermarchés, nous sommes contraints de rester prudents dans nos dépenses. Les cadeaux pour les enfants et les repas de fête sont importants après une année de travail, mais on ne va pas faire de grosses dépenses, plutôt trouver des astuces pour économiser. Car il faut aussi prévoir les dépenses de janvier, avec la rentrée scolaire.»
Un autre père de famille, qui achetait des vivres, dit avoir d'abord mis de côté l'argent pour payer la scolarité de son enfant avant de faire ses achats. Toutefois, pour lui, peu importe la situation économique, la plupart des Mauriciens dépensent leur argent dans les centres commerciaux ou d'autres commerces. «Je constate que, faute de divertissements culturels et éducatifs, les Mauriciens consomment plus pour pallier ce manque. Ils veulent profiter de la vie», estime-t-il.