Les 4 et 5 octobre 2024, la France accueille le 19e sommet de la Francophonie qui s'ouvre aujourd'hui même à Villers-Cotterêts, au Nord de Paris, trente-trois ans après celui de 1991 (le 4e) qui s'était tenu dans la capitale française.
Un sommet qui semble le bienvenu en terre hexagonale, d'autant plus qu'il intervient dans un contexte particulier où les rapports de la France avec ses anciennes colonies africaines qui forment le plus gros contingent de ce regroupement, ont beaucoup évolué. En tout cas, si certains pays africains continuent de filer le parfait amour avec l'ancêtre gaulois, il en va autrement pour d'autres qui sont dans une logique de diversification des partenaires, voire d'affranchissement de l'ancienne puissance coloniale.
Sont de ceux-là les pays du Sahel comme le Mali, le Burkina Faso et le Niger, qui restent suspendus de l'Organisation pour des raisons de coup d'Etat, au contraire de la Guinée qui a été réadmise à la veille du sommet, alors que le processus de transition qui y est aussi toujours en cours, continue de soulever des interrogations.
Ce sommet peut être une bonne occasion pour l'Elysée, de consolider ses liens avec ses partenaires africains
Toujours est-il que sur la cinquantaine de chefs d'Etat et de gouvernement attendus à ce rendez-vous des pays ayant en partage le français, une quinzaine viennent d'Afrique. Une participation du continent noir qui est loin des records que le sommet a déjà connus de par le passé, quand on sait que le continent noir compte 54 membres de plein droit au sein de l'organisation.
Mais cela n'enlève rien à l'importance de ce sommet qui vise au renforcement de la coopération politique, économique et culturelle au sein de l'organisation dont l'un des objectifs est la promotion de la langue française. Toujours est-il qu'au-delà de la symbolique, le fait de le tenir dans la capitale française n'est pas forcément symptomatique de la volonté de Paris de se rappeler aux bons souvenirs de ses alliés francophones.
Mais ce sommet peut être une bonne occasion pour l'Elysée, de consolider ses liens avec ses partenaires africains au moment où le vent du sentiment anti-français n'a pas fini de souffler sur un continent en pleine mutation et confronté à des défis divers. Et la médiation entreprise par le président français, Emmanuel Macron, entre ses homologues rwandais, Paul Kagame, et congolais, Félix Tshisékédi, qui sont à couteaux tirés en raison de la guerre dans le Nord-Kivu, participe de cette volonté de Paris d'apporter sa pierre à la résolution de la crise entre Kigali et Kinshasa, et de rester un partenaire de choix pour l'Afrique.
La question qui se pose est la suivante : le chef de l'Etat français réussira-t-il à concilier les deux présidents ennemis ? La question est d'autant plus fondée que la tension reste vive entre les deux chefs d'Etat voisins qui s'accusent mutuellement de soutiens à des groupes rebelles hostiles à leurs régimes respectifs.
L'espoir de pousser les deux présidents à la paix des braves
En l'occurrence le M23 qui sévit durement dans l'Est de la RDC où des pans entiers du territoire ont été mis sous coupe réglée. Et qui cristallise la colère du maître de Kinshasa qui, tout en exigeant « le retrait immédiat et inconditionnel des troupes rwandaises » du territoire congolais, a récemment encore appelé, à la tribune de l'ONU, à des « sanctions ciblées » contre son voisin accusé d'alimenter la guerre par son soutien aux insurgés.
De son côté, l'homme fort de Kigali ne voit pas d'un bon oeil la présence, sur le sol congolais, des Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR) hostiles à son régime, sans que Kinshasa ne lève le doigt pour les neutraliser. C'est dire la profondeur de la crise qui divise les deux capitales. C'est dire aussi l'ardeur de la tâche du patron de l'Elysée qui recevra tour à tour les deux chefs d'Etat en marge du sommet de la Francophonie, dans l'espoir de les pousser à la paix des braves pour conclure « un accord au plus vite » visant à mettre fin aux violences dans l'Est de la RDC.
Lesquelles violences ont déjà causé des milliers de morts et des millions de déplacés et sont à l'origine de l'une des pires crises humanitaires au monde. Tout le mal qu'on souhaite au président Macron, c'est de réussir là où des organisations régionales comme la Communauté de l'Afrique de l'Est (EAC) ou même continentales comme l'Union africaine, n'ont pu obtenir le silence des armes, encore moins le retour de la paix.