Si l’on devait caractériser la situation actuelle entre la CEDEAO et la confédération de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) , on pourrait dire en grossissant un peu les traits, qu’on se dirige vers une coexistence pacifique, qui est le principe selon lequel, deux États ou groupes d'États, aux idéologies opposées, acceptent de ne pas entrer en conflit armé.
Il est vrai que dans le cas d’espèce, on est dans un processus dont tous les ingrédients montrent que les deux entités ont choisi de cheminer chacun de son côté, en ouvrant une perspective diplomatique de bon voisinage.
En tout cas, c’est ce qui ressort à demi-mots du communiqué issu de la réunion du collège des chefs d’Etat de la confédération de l’Alliance des états du sahel (AES), dans lequel il est clairement indiqué, avec beaucoup de sous-entendus il est vrai, que l’espace de l’AES est ouvert à la libre circulation des personnes et des biens en provenance des Etats de l’actuelle CEDEAO. « Espace sans visa » pour ainsi dire. Il est en outre indiqué que les droits d’établissement et de résidence y sont garantis.
Toutefois, aucune allusion n’est faite au traité de la CEDEAO, comme pour dire la page de la CEDEAO est définitivement tournée ; c’est le sens qu’il faut donner à la résolution issue de la rencontre du 13 décembre des ministres des affaires étrangères des 3 pays.
Le moment choisi pour annoncer cette position de principe est très important, car l’annonce a été faite la veille de la tenue du sommet des chefs d’états de la CEDEAO, le dernier d’ailleurs avant la date statutaire ultime de janvier 2025, pour sceller la sortie des pays de l’AES de la CEDEAO, comme ils en avaient décidé au tout début de la crise.
Cependant, tout laisse croire que la porte de sortie des pays de l’AES est seulement entrebâillée des deux côtés d’ailleurs. La Cedeao par sa décision sortie du sommet des chefs d’Etat de ce dimanche 15 Décembre à Abuja est à comprendre dans ce sens.
Il semble que le message des trois juntes ait été entendu, et c’était l’effet recherché. Il faut le dire le paragraphe 3 de la déclaration du collège des chefs d’Etats de l’AES du 14 décembre ainsi libellée « Toutefois, les Etats membres de la Confédération se réservent le droit, conformément à leurs lois et règlements, de refuser l'entrée sur leurs territoires à tout ressortissant de la CEDEAO entrant dans la catégorie des immigrants inadmissibles », est explicite sans pourtant préciser le sens de « la catégorie des immigrants inadmissibles ». Faut-il entendre par là de possibles mesures dérogatoires à la libre circulation, sous prétexte de réciprocité ?
La décision issue du sommet des chefs d’Etat de la CEDEAO de ce dimanche 15 décembre 2024, en faveur d’un délai supplémentaire de 6 mois pour donner une ultime chance à la médiation du Président Sénégalais Bassirou Diomaye Faye est une réponse d’ouverture aux chefs d’état de l’AES.
Pourtant, le président de la commission de la CEDEAO, Oumar Allieu Tourray, avait fait savoir que la sortie de la CEDEAO par les pays de l’AES devrait entrainer de facto des mesures restrictives, aux regard des dispositions concernant le traité révisé de l’organisation régionale, et particulièrement sur la libre circulation.
La décision de la CEDEAO de ce dimanche, tirant les conclusions de la médiation des Présidents Sénégalais Bassirou Diomaye Faye et togolais, Faure Gnassingbé, semble opter pour le maintien du statu quo, en sachant que les jalons posés par les pays de l’AES qui faut-il le rappeler, disposent déjà d’un passeport commun et des structures communes de coopération, y compris sur le plan sécuritaire. Ils attendent donc l’application de la réciprocité vis-à-vis de la CEDEAO, ayant déjà acté pour « rupture ». A défaut tout semble dessiner une nouvelle ère avec deux entités appelées à coopérer pour sauver ce qui peut l’être, à savoir le cadre l’UEMOA dont ils sont parties avec les autres pays de la zone CFA et la ZLECAF leur marché commun.
Le prochain semestre de 2025 nous édifiera certainement sur l’épilogue de ce face à face, sur le futur de la CEDEAO et de l’AES.