Afrique Centrale: Reprise des combats sur fond de pourparlers à Luanda - La RDC connaitra-t-elle - jamais la paix ?

Des combattants du M23 (photo d'illustration)
27 Octobre 2024

Le cessez-le-feu décrété par Luanda n'aura duré que le temps d'un feu de paille. C'est le moins que l'on puisse dire. En effet, les combats ont repris dans l'Est de la République démocratique du Congo (RDC) entre les groupes armés progouvernementaux encore appelés Wazalendo et les rebelles du M23 soutenus par Kigali.

La reprise des combats serait, selon plusieurs sources, à l'initiative des frontistes contre le gouvernement de Kinshasa, qui cherchent à contrôler le territoire très riche en minerais du Nord- Kivu, la zone de Walikale et cela passe par la prise de la ville de Pinga, une importante base de l'armée congolaise et ses alliés où se trouve un aérodrome stratégique.

En attendant de revenir sur les conséquences de cette nouvelle flambée de violences en RDC, le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle vient, quelque peu, saper les efforts diplomatiques du président angolais, Joao Lourenço, visant à apaiser les tensions avec le Rwanda.

La reprise des combats en pleines négociations, est la preuve que Congolais et Rwandais négocient le poignard dans le dos

En effet, pas plus tard que le 19 octobre dernier, le médiateur angolais avait eu une conversation téléphonique avec les deux chefs d'Etat en froid et cela, suite à la cinquième réunion ministérielle tenue à Luanda, le 12 octobre 2024 et qui avait laissé entrevoir une accalmie. Et c'est au moment où l'Angola devait soumettre aux négociateurs des deux parties, un concept des opérations (Conops), du nom de ce document stratégique qui prend en compte les préoccupations des deux belligérants, que les hostilités ont repris.

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L'on peut donc s'interroger sur la sincérité des échanges entre les protagonistes. La reprise des combats en pleines négociations, est la preuve que Congolais et Rwandais négocient le poignard dans le dos. On sait, en effet, que l'issue des pourparlers est souvent déterminée par les rapports de force sur le terrain. Dans un tel cas de figure, les rebelles à la solde de Kigali seraient en train de marquer de nombreux points en avançant presque sans résistance face à une armée congolaise qui semble avoir levé le pied ou qui, simplement, ne fait pas le poids face à un adversaire très déterminé.

Mais quels que soient les motivations et les objectifs de cette nouvelle offensive des rebelles du M23, elle est lourde de conséquences pour les populations civiles. Car, les combats très violents ont occasionné des déplacements massifs de populations. Alors que l'on dénombre une dizaine de civils tués, des centaines d'enfants, en majorité des femmes et des enfants, affluent, selon certaines sources, dans la ville de Pinga et sous une pluie battante.

L'on n'est donc pas loin du drame humanitaire au moment où la communauté internationale, quelque peu blasée par ce conflit qui s'éternise, a le regard tourné vers l'autre point chaud de la planète qu'est la bande de Gaza et le Liban où Israël mène de violentes opérations militaires. Au plan politique, le rapport de forces nettement défavorable aux combattants pro-gouvernementaux, ne peut manquer de susciter certaines interrogations dont la principale est celle de la loyauté des troupes au régime du président Félix Tshisekedi.

La RDC est en droit d'attendre de la communauté internationale, qu'elle accentue la pression sur le régime de Paul Kagame

Au-delà de cette question de la loyauté de l'armée, le doute aussi s'installe sur la capacité du président Tshisekedi à faire face au cancer qui ronge l'Est de son pays et qui, avec ce nouveau développement, menace d'entrer dans une phase de métastase. Toutes ces interrogations, pour l'instant, sans réponse, devraient pousser le régime de Kinshasa à ravaler son orgueil et descendre de son piédestal pour donner toutes les chances aux négociations en cours à Luanda.

D'un point de vue stratégique, cela peut même avoir son pesant d'or dans la mesure où ces négociations peuvent permettre à Kinshasa de gagner du temps pour réorganiser son armée. Ce n'est donc plus une question de choix politique mais plus une question de survie. Mais la question que l'on peut se poser, est la suivante : Félix Tshisekedi peut-il avoir de lui-même ce courage s'il n'y est pas contraint par sa base politique et donc par les populations ?

On peut en douter et c'est en raison de cela que l'on est en droit d'espérer des forces vives de la nation congolaise, un sursaut patriotique différent de celui qu'elles ont jusque-là montré et qui a consisté en des manifestations organisées en direction des chancelleries occidentales et des institutions onusiennes pour dénoncer leur impéritie face à la crise sécuritaire qui secoue le pays. Ces forces vives se doivent d'être plus sensibles aux souffrances de leurs compatriotes de la région tourmentée du Nord-Kivu et exiger du pouvoir politique, une attitude plus favorable face aux négociations qui, pour l'instant, constituent la seule porte de sortie de cette géhenne imposée aux innocentes populations de la RDC.

Cela dit, la RDC est en droit d'attendre de la communauté internationale, et en vertu des règles qui régissent la marche du monde, qu'elle accentue la pression sur le régime de Paul Kagame afin qu'il cesse ses actions de déstabilisation à l'endroit de son voisin. Le Rwanda lui-même doit comprendre que la politique belliciste en direction de ses voisins, ne peut indéfiniment prospérer. Car, les rebellions qu'il alimente finiront toujours comme tous les monstres, par dévorer leurs géniteurs.

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